L’Institut français à pleine vitesse, notre échange avec son directeur Matthieu Berton

L’Institut français à pleine vitesse, notre échange avec son directeur Matthieu Berton

Matthieu Berton

À l’approche du 14 juillet, Matthieu Berton, le directeur de l’Institut français de Budapest, a accordé un entretien à notre rédaction. L’occasion pour nous de revenir sur sa première année à la tête de l’Institut et ses projets pour l’avenir.

JFB : L’Institut Français est un haut lieu de la promotion de la culture française en Hongrie, dans un pays où l’on « jette son regard », selon les mots du poète Batsányi, depuis longtemps vers la France. Quels sont vos principaux projets à la veille du 14 juillet et à la suite du dernier Conseil d’orientation stratégique de l’Institut ?

Matthieu Berton : Effectivement, cela fait maintenant un an que je suis en poste à Budapest, et je suis très impressionné par l’amour et le vif intérêt qu’ont les Hongrois pour la France. Ce qui est frappant, c’est que même ceux qui ne parlent pas français ont une opinion très positive de notre pays. C’est donc très agréable d’exercer dans un pays où la perception de la France est aussi favorable.

Cependant, cette attente crée aussi une responsabilité. À l’époque de la création de l’Institut, celui-ci représentait la quasi-unique vitrine de la culture française en Hongrie. Aujourd’hui, de nombreux événements à caractère français ont lieu indépendamment de l’Institut. Chaque mois, un concert, une exposition, un auteur ou un intellectuel français est accueilli à Budapest. À part le festival du film francophone traditionnel, il en existe désormais un autre, diffusant également des films français qui n’est pas directement organisé par nous. Les Hongrois ont maintenant un véritable accès à la culture française.

L’Institut Français doit donc se positionner clairement dans cette offre importante. Dans ce contexte, je souhaite que l’Institut continue de proposer une programmation culturelle forte, adaptée à notre public, et suffisamment attractive pour que les gens aient envie de venir jusqu’à nous.

Notre action se déploie à trois niveaux complémentaires. D’abord, localement, nous cherchons à toucher les publics du quartier, avec l’ambition de faire de l’Institut un véritable centre culturel de proximité, notamment dans le 1er arrondissement, y compris pour les personnes non francophones. Ensuite, à l’échelle de Budapest et de l’ensemble de la Hongrie, nous collaborons avec nos partenaires locaux et soutenons activement des événements en région. Enfin, nous apportons notre appui à des manifestations culturelles organisées par d’autres structures lorsque nous ne pouvons pas les porter nous-mêmes ; c’est par exemple le cas de la grande exposition consacrée à Marcel Duchamp au musée Ludwig, que nous avons soutenue.

Matthieu Berton

JFB : L’Institut Français propose des cours de français à un public varié. Comment convaincre un étudiant de choisir le français ?

M. B. : L’Institut n’est pas uniquement un centre culturel, c’est aussi un centre de langue très actif. Nous enregistrons environ 2 500 inscriptions par an, disposons de 9 salles de cours et d’une équipe de 15 professeurs. En réalité, il est assez facile de convaincre : l’intérêt pour la France est bien réel. Aujourd’hui, la demande de français dans les écoles hongroises dépasse même l’offre ! Le défi n’est donc pas tant de recruter des apprenants, mais de trouver suffisamment d’enseignants pour répondre à cette demande. A l’Institut c’est un peu différent car les cours sont payants. Mais c’est plutôt stable. Nous menons chaque année une campagne de communication, notamment dans le métro et sur les bus, ce qui renforce notre visibilité. L’enjeu principal est de faire en sorte que les apprenants choisissent l’Institut !

Notre argument phare : le français est la langue avec la plus forte expansion démographique au monde. Le nombre de locuteurs francophones croît rapidement dans le monde, notamment en Afrique, on en compte déjà environ 350 millions. Maîtriser le français en plus de l’anglais permet de voyager et de travailler dans de nombreuses régions du monde.

Apprendre une langue, c’est aussi s’ouvrir à une culture, ou dans notre cas, à plusieurs cultures francophones. Parler français, c’est s’enrichir humainement, culturellement, intellectuellement.

JFB : Quelles sont vos relations avec les enseignants en dehors de l’Institut ?

M. B. : Nous tenons à entretenir une relation forte avec les enseignants de français, car c’est un métier essentiel, au service de la société. Nous essayons de les soutenir au mieux, notamment en leur proposant des moments d’échange et de formation.

Chaque été, nous organisons une université d’été gratuite d’une semaine, avec des ateliers pédagogiques, des formations, et des temps de rencontre. En novembre, à l’occasion de la Journée internationale des professeurs de français, nous organisons une conférence suivie d’un moment convivial. Ce sont des occasions précieuses pour renforcer les liens entre professeurs et valoriser leur engagement.

Et bien sûr, si certains rencontrent des difficultés, nous faisons en sorte de leur apporter notre soutien.

Matthieu Berton

JFB : Que signifie pour vous, dans votre parcours personnel, être directeur de l’Institut Français à Budapest ?

M. B. : C’est une grande fierté. Être directeur d’un Institut Français est en soi un privilège, mais l’être à Budapest me touche tout particulièrement. Je connaissais des personnes qui y avaient travaillé avant moi et j’avais une image très positive de ce poste.

D’un point de vue personnel, c’est une immense joie d’avoir été nommé ici. C’est aussi une responsabilité : l’Institut de Budapest est l’un des plus grands d’Europe, avec une longue histoire. Je suis ambitieux, je souhaite être à la hauteur de cette histoire et des attentes des Hongrois, qui connaissent et fréquentent ce lieu depuis 30, 40, parfois 50 ans.

JFB : Quels sont les projets de l’institut pour les mois à venir ?

M. B. : Nous avons plusieurs projets d’aménagement et de réorganisation de l’espace. Actuellement, l’Institut est peu visible de l’extérieur, ce que nous souhaitons changer. L’idée est de créer des espaces ouverts et transparents, qui invitent naturellement à entrer.

Nous prévoyons notamment de déplacer le café et d’aménager une salle multifonctions, qui pourrait accueillir des expositions, des ateliers, des petites conférences et des petits concerts. Ces travaux devraient avoir lieu entre l’automne et l’hiver prochains.

Par ailleurs, lorsque des partenaires organisent des événements dans nos locaux, la programmation est souvent complète. Nous voulons donc relancer un cycle de concerts et développer des partenariats avec des orchestres hongrois, afin de dynamiser encore davantage notre offre culturelle.

JFB : À la veille du 14 juillet, que prévoyez-vous pour célébrer l’événement ?

M. B. : Comme chaque année, nous allons organiser un bal populaire en plein air devant l’Institut. Cette année, nous attendons environ 1 000 personnes, ce qui en fera une édition exceptionnelle. À l’image du bal des pompiers en France, c’est un événement festif, familial et convivial, ouvert à tous.

Des musiciens français et hongrois animeront la soirée, suivis par un DJ. Le programme mêlera musiques classiques et musiques actuelles, pour rassembler toutes les générations. C’est un moment où l’on célèbre ensemble la joie d’être réunis, dans l’esprit du 14 juillet.

Propos recueillis par Éva Vámos, Csanád Cserháti & Paul Rabeisen

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