Une affaire sans précédent

Une affaire sans précédent

Investissement du groupe Audi

 

Accusé de corruption, le militant écologiste, Ferenc Zsák, qui s’est opposé à l’investissement du constructeur automobile allemand Audi à Győr, a passé quatre mois en détention préventive.

 

 

 

Ferenc Zsák est le premier activiste “vert” à être emprisonné en Hongrie depuis le changement de régime. Le 30 mai dernier, le président de la Tiszántúli Természetvédô Társaság (Société des Amis de la Nature de Tisztántúl, TTT) a en effet été arrêté. Deux semaines plus tard, le Procureur a demandé à ce qu’il soit placé en détention préventive. L’activiste a été remis en liberté quatre mois plus tard, en octobre.

Zsák a été accusé par Audi d’actes de corruption dans une affaire où il s’est opposé à la construction près de Győr d’une de leurs usines de construction automobile. Ce sont 900 millions d’Euros qu’Audi envisage d’investir dans ce projet. De son côté cependant Zsák affirme, au contraire, que l’avocat de l’un des sous-traitants du projet, Strabag, lui aurait offert une somme de 30 millions de forints (100 000 euros) pour qu’il empêche les membres de son association de retarder le projet de construction. Après sa libération, Zsák a remis, en guise de preuve, un enregistrement sonore prouvant ses déclarations. Malgré cela, il s’avère que la lumière n’a toujours pas été faite sur les faits qui opposent Audi et l’activiste.

 

Classement revu

La TTT s’est opposée à ce projet de construction dès son origine, car la Société automobile envisageait de le réaliser sur un site naturel classé par l’Union européenne. D’après les études d’impact réalisées, un tel projet menacerait plus de 100 spécimens d’animaux et de plantes protégés. Ce terrain, objet du litige, était initialement la propriété du ministère de la Défense. Ce dernier avait même bénéficié d’une aide de l’Union européenne d’un montant de 1,27 millions d’euros pour la réhabilitation du site. Toutefois, la Commission européenne s’est ravisée et a laissé l’Etat hongrois déclasser le terrain afin qu’Audi puisse réaliser son investissement. L’„intérêt public” a été le maître mot pour justifier le déclassement. Audi, avec ce projet de construction, envisage de créer 15 000 emplois. Ce seront également 11,6 milliards de forints (38 millions d’euros) qui rentreront ainsi dans le budget de l’Etat. Ce dernier a néanmoins enjoint la société allemande de financer un projet de protection environnemental sur une surface représentant le triple de l’espace occupé par la construction neuve. Il a également demandé à Audi de déplacer les espèces animales et végétales protégées sur un site adéquat.

Les verts ont cependant remis en question l’efficacité du plan de déplacement des animaux et végétaux protégés. Les ONG ont suggéré qu’Audi puisse trouver un autre site que celui envisagé. La TTT a même porté l’affaire devant les organisations internationales. Elle a déposé une plainte contre le ministère de la Défense auprès de l'Office européen de lutte anti-fraude en indiquant que ce dernier a bénéficié de subventions pour la réhabilitation du site alors même que le terrain a été affecté à la construction du projet d’Audi. L’organisation a également demandé à la Commission européenne de revoir le classement du terrain en question. Zsák a fini par retirer la plainte qu’il a déposé contre Audi. Puis, il a dû arrêter de défendre cette cause auprès des instances internationales en juin dernier. Et pour cause, puisque la police l’a alors arrêté et a saisi toute sa documentation ainsi que son ordinateur. Il n’a pas pu dès lors participer à la manifestation organisée à l’occasion de la cérémonie d’inauguration du nouveau bâtiment.

Quoi qu’il se soit passé entre l’activiste et l’investisseur, il reste incompréhensible que Zsák n’ait pas eu les moyens de se défendre dans ce litige qui les opposait. Le Comité Helsinki Hongrois a déclaré que la TTT souhaitait déposer une requête auprès de la Cour Européenne des Droits de l'Homme sur les motifs de la détention préventive de Zsák. Les organisations écologistes demandent également à ce que les contrats signés entre le gouvernement hongrois et le constucteur automobile soient rendus publics.

Judit Zeisler

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