MSzP : le parcours du combattant

MSzP : le parcours du combattant

 

Le Parti Socialiste hongrois ne parvient pas à redresser une image impopulaire due aux réformes et grandement entachée par l’affaire des mensonges électoraux. Alors que les rangs des parlementaires doutent du leadership du Premier ministre, le principal parti gouvernemental doit désormais faire face à l’idée de perdre ses alliés libéraux du SzDSz.

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La liste des griefs destinés au MSzP (Magyar Szocialista Párt) par ses détracteurs est longue. Son origine même est une source intarissable de débats animés chez ses opposants. Bien qu’il ait été fondé officiellement en octobre 1989, il est issu de l’ancien Parti Socialiste Ouvrier Hongrois (Magyar Szocialista Munkáspárt – MSZM). Quoiqu'en se transformant, il ait abandonné le terme d’ouvrier comme le thème ouvriériste, cela ne l’a pas empêché de perdre très nettement les premières élections de l’ère démocratique en 1990 en n'obtenant que 10,4% des votes. Comme dans d’autres pays postcommunistes, c’est alors la droite, cheville ouvrière de l’anticommunisme, qui est alors passée au pouvoir.

Pourtant, au regard des difficultés relatives à la période de transition, le MSzP fait un retour en force en 1994 en gagnant les élections législatives haut la main, ce qui confère une majorité absolue au Premier ministre d'alors, Gyula Horn. En s’accordant sur la nomination de ce dernier au poste de chef de gouvernement, la stratégie du MSzP s’est inscrite dans une continuité relative avec le MSzM, puisqu’il fut ministre des affaires étrangères du dernier gouvernement de l’ère socialiste. Il appartenait certes au gouvernement de Miklos Németh qui a provoqué la fin du système, voire la chute du mur de Berlin, en ouvrant sa frontière avec l’Autriche pour les Allemands de l’Est, mais le symbole restait fort et le MSzP perdit les élections de 1998.

Afin de renouer avec le succès, le MSzP inaugure alors une alliance avec les libéraux du SzDSz (Szabad Demokraták Szövetsége, l’Alliance des Démocrates Libres), ce qui a tendance à le distancer idéologiquement du MSzM. La tactique fonctionne, mais c’est Péter Medgyessy, ministre avant 1989, qui devient alors Premier ministre. Le parti ne rompt donc pas avec un héritage historique difficile à porter, et qui est encore plus flagrant quand le quotidien de droite Magyar Nemzet révèle en 2002 que Medgyessy a travaillé dans le contre-espionnage avant la chute du rideau de fer. Tout en reconnaissant la chose, Péter Medgyessy affirme alors que son but était de protéger la Hongrie de l’ingérence du KGB. Rien n’y fait, le SzDSz lui retire sa confiance en 2004 et il démissionne.

C’est son ancien conseiller et rival au sein du MSzP, Ferenc Gyurcsány, businessman qui a fait fortune lors de la privatisation des entreprises publiques dans les années 1990 qui lui succède entre 2004 et 2006, maintenant l’alliance avec le SzDSz qui voit en lui un chef de gouvernement plus ou moins équilibré. Il mène le MSzP à la victoire aux élections législatives de 2006 malgré les critiques sociaux-conservatrices du parti de droite Fidesz.

Là encore, la droite critique le fait qu’il s’agisse de nouveau d’un ancien responsable de l’ère communiste, car Ferenc Gyurcsány a assumé des responsabilités au KISZ, les Jeunesses Communistes hongroises. Mais c’est une autre affaire qui va le mettre en difficulté. Peu après son succès électoral et sa reconduction au poste de Premier ministre, un enregistrement pirate d’une réunion interne du MSzP est diffusé, enregistrement où on l’entend avouer avoir construit sa campagne sur des mensonges énoncés pendant les deux années précédentes. S’en suivent les manifestations et émeutes que l’on sait, et notamment l’incendie de l’immeuble de la radio et la télévision publiques.

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Le bilan des deux gouvernements Gyurcsány est d’autant plus contesté qu’il était déjà critiqué par la droite qui lui reproche de paupériser le pays plutôt que de le développer. Droite et extrême droite s’engouffrent dans le mouvement contestataire et font feu de tout bois. Son ancienne appartenance aux Jeunesses Communistes est agitée comme la preuve que le MSzP est bien dans la continuation du MSzM, fait d’autarcie discrétionnaire et de mensonges propagandistes. La tempête médiatique bouscule le gouvernement et les manifestations récurrentes réclamant son départ qui se terminent souvent dans la violence dans les rangs des opposants comme des policiers, apportent de l’eau au moulin de la droite : le MSzP est encore plus vu comme le parti de la propagande et de la répression.

Pourtant, le Premier ministre tient bon, et est confirmé dans ses fonctions par un vote de confiance au Parlement, aucun des députés MSzP ne votant contre lui. L’application du programme social-libéral est maintenu. Mais les coups récurrents du Fidesz, la permanence des manifestations à chaque fête nationale et le besoin d’un leadership fort ont tout de même tendance à fragiliser l’édifice gouvernemental. Son style emporté, son entêtement à rester chef du gouvernement, l’application d’un programme à tendance fortement libérale finissent par affaiblir ses soutiens.

Des voix s’élèvent au sein du MSzP pour prévenir un probable échec électoral au prochain scrutin parlementaire. Les opposants à une orientation sociale-libérale cherchent ailleurs qu’au gouvernement la possibilité de recentrer les idées du parti autour d’un programme social qui ménage les citoyens et qui est désormais l’apanage du Fidesz. Et l'on voit tout naturellement comme alternative possible un autre responsable politique de premier plan en la personne de Katalin Szili, présidente MSzP au Parlement depuis 2002 et ancienne candidate à la présidence en 2005.

C’est désormais le SzDSz, selon le député Gábor Horn, qui envisage de retirer son soutien au MSzP comme il l’avait fait avec Péter Medgyessy. Dans les rangs du SzDSz comme du MSzP, on s’affole des taux de popularité en chute libre de leurs partis coalisés, 15% pour le premier et moins de 5% pour le second. Reste à savoir si le MSzP gardera le cap des réformes, seule possibilité de rester au pouvoir avec le SzDSz tout en réussissant à limiter la casse sociale et en réduisant le déficit public de 9, 2% du PIB. Une gageure à laquelle l’engage fortement la majorité. Cet angle restreint de sortie de crise est le seul moyen pour le MSzP d’éviter la défaite en 2010, car malgré un programme largement dépensier, construit en opposition aux réformes, et la popularité usée de son leader Viktor Orbán, le Fidesz est à l’affût. Fort de la contestation antigouvernementale, il attend son heure.

Péter Kovács

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