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Suite et fin du mois de l’architecture à Budapest

“Ha !! (Si !!) Meg nem épült Magyarország” est l’une des expositions phares du mois de l’architecture. Conçue autour d’un concept décalé et un tant soit peu politiquement incorrect, elle présente des projets architecturaux qui ont été conçus pour Budapest, mais qui n’ont finalement pas vu le jour et, le cas échéant, la raison pour laquelle ils ont été “enterrés”…

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C’est dans la galerie Körzôgyár, qui connaît avec cette exposition sa dernière manifestation culturelle, après avoir été une manufacture de compas et avant d’être transformée en hôtel, que sont présentés, jusqu’au 31 octobre prochain, de nombreux projets architecturaux avortés dont les auteurs sont des architectes hongrois parmi les plus célèbres. On y découvre ainsi des projets de József Finta (par ailleurs “l’auteur” de l’hôtel Merriot ou encore de l’hôtel Kempinsky, place Erzsébet), de László Rajk (architecte du très original marché Lehel, Váci ut), de György Vadász (à qui l’on doit la rénovation de la piscine du Gellért, mais aussi le superbe pavillon hongrois de l’exposition universelle de Hanovre en 2000), ou encore de Csaba Virág (architecte du Kálvin Center, place Kálvin), et de Péter Sugár (qui vient de réaliser le très beau Lánchíd19 Design Hôtel, le long du Danube, auquel nous vous conseillons vivement de jeter un oeil si vous passez dans le coin).

L’exposition propose ainsi de découvrir différents projets qui n’ont pas eu la chance ou “le mérite” d’exister, et ce pour différentes raisons. Par exemple, explique Béla Káli, curateur de l’exposition, “En Hongrie, que les investisseurs soient privés ou publics, il est coutume d’organiser des concours. Mais très souvent l’investisseur ne tient pas compte du choix du jury et du vainqueur du concours et fait le choix de construire librement et sans concertation le projet qu’il a choisi”.

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L’un des exemples les plus récents et les plus frappants de cet état de fait reste celui du théâtre national, construit en 2002. Le concours, qui réunissait un jury international, avait été remporté par l’architecte Ferenc Bán. Ce projet, que l’on découvre dans l’exposition à travers une maquette ainsi que des plans et dessins (voir illustrations), était originalement prévu pour être construit sur la place Erzsébet, non loin de la place Deák, en plein coeur de Budapest. Les travaux ont été entamés et une immense béance (correspondant aux fondations et au parking prévu sous l’édifice) a été creusée à cet emplacement. 2,5 milliards de HUF étaient déjà investis dans cette première phase du chantier lorsque Viktor Orbán, alors Premier ministre, a décidé d’interrompre la construction, qu’il estimait trop onéreuse “pour la santé financière du pays”, et d’entamer la réalisation du projet de son choix à l’ emplacement qu’il connaît actuellement, à côté du Palais des Arts, pour la somme de 22 milliards de HUF, soit nettement plus que le projet initial. Par la suite, c’est dans ce trou, laissé béant par ce projet inachevé, qu’a été installé le justement et ironiquement bien nommé Gödör (Le Trou), un centre culturel et lieu de concerts vivant et populaire (qui accueille d’ailleurs une exposition à ne pas manquer durant ce mois de l’architecture).

“Je crains que cette tradition des concours où les gagnants sont ensuite destitués perdure à Budapest. Je pense notamment au projet du futur quartier gouvernemental, remporté par les architectes hongrois Péter Janesch et japonais Kengo Kuma : rien n’assure qu’il sera réellement réalisé. Ou encore le projet de l’architecte française Manuelle Gautrand, présente durant le mois de l’architecture en 2006 pour évoquer son projet de réhabilitation des Grands Magasins Parisiens sur l’avenue Andrássy. Elle avait en effet remporté le concours, mais sa proposition s’est finalement vue refusée par les Monuments Nationaux au profit d’un architecte hongrois...”, explique Béla Káli.

Cette exposition présente également un projet de Péter Janesch conçu en 1998 pour les archives nationales. Le jury était alors persuadé qu’il s’agissait de l’oeuvre d’une équipe étrangère, du fait de la qualité et du soin apporté à l’élaboration des éléments présentés, et c’est la raison pour laquelle ils ont finalement choisi un projet de moindre envergure. Pourquoi? “Parce qu’il n’était pas envisageable de faire appel à une équipe étrangère. Par tradition... et étroitesse d’esprit”.

Outre des maquettes, des plans, des esquisses, etc... qui entraînent le spectateur dans l’imaginaire d’architectes parfois visionnaires, l’exposition propose également les projections d’un film (vision ludique de ce à quoi Budapet aurait pu ressembler si…), mais aussi d’images de synthèse. Soulignons, par ailleurs, que des explications en anglais sont disponibles pour plus de détails sur les différents projets présentés. Bonne exposition à tous, si...

Frédérique Lemerre

Ha !!

A la galerie Körzôgyár. Ve arr. Molnár utca, 35.

Jusqu’au 31 octobre.

Ouvert du mardi au samedi

de 14h à 20h.

Entrée libre.

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