Budapest : une rentrée musicale prometteuse...

Budapest : une rentrée musicale prometteuse...

Rentrée musicale

A tout seigneur, tout honneur, nous commencerons par l´Orchestre du Festival de Budapest (BFZ) et son chef Iván Fischer. A peine rentrés d´une tournée couronnée de succès à l´étranger (notamment avec la pianiste chinoise Yuja Wang - 1er concerto de Liszt-  dans un concert donné à Lucerne), nos amis entament la saison avec une production inédite du Couronnement de Poppée de Monteverdi. Version donnée, non sur une scène d´opéra, mais en salle de concert. Néanmoins agrémentée de costumes et d´une mise-en-scène concoctée, comme à son habitude, par le chef lui-même en association avec le metteur-en-scène italien Marco Gandini, ancien collaborateur de Zeffirelli. Faisant appel à une brochette internationale de chanteurs de premier plan : la soprane trinitaine Jeanine De Bique dans le rôle-titre, entourée du contre-ténor allemand, Valer Sabadus (Nerone), né en Transylvanie, de l´Américain Reginald Mobley (Ottone), de l´Écossais Stuart Pettersen (Eros) et de la Catalane - qui s’est déjà produite à Budapest - Núria Rial. Toutes et tous titulaires de prix prestigieux. Une mise-en-scène proche du théâtre, le chef hongrois, qui voit en Poppée un véritable drame shakespearien, associant volontiers les deux genres, théâtre et opéra, entre lesquels il déclare ne pas faire de distinction. Une première donnée avec grand succès le 9 septembre sur la scène du Palais des Arts (Müpa), suivie de deux autres représentations.

Pour enchaîner, toujours au Palais des Arts et en liaison avec ses animateurs, sur une quinzaine „Passerelles à travers l´Europe” (17- 30 septembre), thème particulièrement cher à Iván Fischer. Cette année, après la France et l´Angleterre, l´hôte sera non pas un pays, mais une ville : Berlin. Avec entre autres la venue de l´orchestre du Konzerthaus, dont Iván Fischer assure la direction musicale. Une manifestation s´ouvrant sur une soirée associant artistes et compositeurs allemands et hongrois sous le motto „Von Bartók bis Bartók”. Suivie le lendemain d´un concert d´ouverture consacré à Liszt - dont on célèbre cette année le 210e anniversaire – placé sous le signe de son amitié avec Berlioz (concerto de piano avec Dejan Lazić en soliste et Faust symphonie). Pour la suite, les organisateurs nous promettent un programme riche et varié, allant du classique au jazz en passant par la musique électronique, agrémenté de projections de films. A signaler entre autres un récital de lieder „Budapest-Berlin” et le temps fort que constituera le concert donné par l´orchestre du Konzerthaus.

Autre manifestation majeure, se déroulant du 12 au 19 septembre dans le cadre de l´Académie de Musique (Zeneakadémia), le concours international de piano Franz Liszt (Liszt Ferenc nemzetközi zongoraverseny). Concours institué en 1933 dont la première lauréate fut la pianiste hongroise Annie Fischer. Une référence, donc… Une épreuve réunissant cette année 37 concurrents, dont 22 venus de l´étranger, retenus après présélection (1). Une originalité : les instruments sont gracieusement mis à disposition par quatre grands facteurs de piano, de façon à laisser aux concurrents le choix de leur instrument. Un concours axé, anniversaires oblige, sur les noms de Liszt et Cziffra. Parmi les membres du jury, notre compatriote Cyprien Katsaris. En ouverture, concert donné par une jeune formation, la Philharmonie St Etienne (Szent István Filharmikusok) sous la baguette de János Kovács avec le pianiste János Balázs en soliste, ancien lauréat et co-animateur de la manifestation (Fantaisie hongroise, „les Préludes”, extraits de l´oratorio de Noël „Christus”). Et concert de gala pour la clôture le 19 avec entre autres les deux concertos de Liszt.

Puisque c´est le temps des concours, signalons au passage un concours de chant qui s´est également tenu dans les locaux de l´Académie Franz Liszt (29.8 - 5.9), le IVe concours international de chant Éva Marton (2), remporté cette année par la jeune soprane serbe Sonja Šarić.

Rentrée musicale

Autre temps fort de la rentrée, la représentation d´un opéra baroque totalement inédit : „Omphale” du Français Jean-Baptiste Cardonne (1730-1792), produit pour la première fois depuis sa création en 1769. Par György Vashegyi, son orchestre Orfeo (sur instruments anciens) et le chœur Purcell en liaison étroite avec le Centre de Musique Baroque de Versailles, avec le concours de chanteurs venus de France, de Belgique et des Pays-Bas, dont la soprane Chantal Santon Jeffery, déjà bien connue du public hongrois (16 septembre au Palais des Arts).

Enfin, autre temps fort, invitation par l´Opéra de notre Patricia Petibon „nationale”, enfant chérie du public hongrois. Dans un récital donné le 28 août avec le célèbre ténor américain Lawrence Brownee. Récital donné en plein air devant l´Espace Eiffel (l´opéra étant fermé pour travaux), au profit de la Fondation Regőczi venant en aide aux orphelins victimes de la Covid. Récital où les deux chanteurs étaient entourés d´une kyrielle d´artistes hongrois sur un programme consacré à Bizet, Erkel, Gershwin, Mozart, Puccini, Johann Strauss junior et Verdi. De quoi ravir les admirateurs de notre compatriote.

Et puis, bien sûr, reprise des concerts traditionnels. Formations, nombreuses sur la place, parmi lesquelles je citerai l´excellent ensemble Concerto Budapest d´András Keller, dont l´une des invitées sera notre compatriote (d´origine géorgienne), l´affriolante Khatia Buniatishvili.

Et voilà… en attendant la suite (pour nous faire oublier, ne serait-ce que le temps d´un concert, les facéties de ce maudit virus…).

Pierre Waline

(1): Nombre de candidats résidant en Asie n´ayant pu se déplacer en raison de la pandémie.

(2): Éva Marton, célèbre soprane hongroise (aujourd´hui retirée) hôte régulière des scènes internationales.

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