UH Festival :«Notre musique n’est pas commerciale»

UH Festival :«Notre musique n’est pas commerciale»

Pendant une semaine le non-lucratif UH Festival a sublimé la musique moderne. Disséminée dans plusieurs spots de Budapest à l’ambiance obscure et brumeuse, l’assistance a écouté religieusement les artistes. Avec plus de 450 concerts à leur actif depuis 2001, András Nun et Krisztián Puskár, deux des cinq organisateurs, rassemblent les sons qui leur ressemblent et promeuvent le partage des plaisirs auditifs. Leur refrain : laisser davantage de place à l’ouïe qu’à la démonstration scénique.

 

JFB : Quand avez-vous créé l’UH ?

Krisztián Puskár : Pour ma part, j’ai rejoint le festival plus tard, mais András l’a créé il y’a une quinzaine d’années, en 2001. L’UltraHang n’a pas eu lieu tous les ans, seulement sept fois.

JFB : Pourquoi avez-vous initialement organisé ce festival ?

András Nun : Pour soutenir le son que nous aimons. Budapest n’est en réalité pas vraiment connectée aux centres de la musique moderne. L’UH sert à la mettre en avant et à la démocratiser. Nous avions plusieurs idées : soit ouvrir une boîte de nuit, soit organiser des concerts. Il s’avère que créer ce festival était la forme la plus adéquate, sans aucun doute.

JFB : Quel genre de musique plébiscitez-vous ?

K.P. : Tous les styles de musique. Nous ne sommes pas fermés, mais nous partageons globalement la même idée de la musique, et mise à part la modernité et l’innovation des artistes que nous sollicitons, nous n’avons pas de style en particulier. Nous ne voulons pas nous fermer des portes.

A.N. : C’est de la musique à laquelle on assiste assis, pour écouter, et non pas pour danser comme de l’électro ou de la techno.

JFB : Est-ce que le Festival s’est toujours déroulé dans l’enceinte même de Budapest ?

K.P. : Au début, oui. L’enceinte de base se trouve au Budapest Jazz Club (un bar-salle de concerts entre le Danube et Nyugati Pályaudvar, ndlr). Puis il y a eu des sortes de « showcases » dans les capitales des pays voisins telles que Ljubljana, Bratislava, Vienne… Mais Budapest reste le centre principal de notre activité musicale.

JFB : Travaillez-vous uniquement pour le festival ?

A.N. : Non, dans la mesure où cela ne nous rapporte rien. Seule notre passion pour la musique nous pousse à le faire. Nous avons des jobs tous différents les uns des autres.

K.P. : Par contre, nous nous occupons pleinement de l’organisation : la tenue du site internet, le booking, le contact des artistes, la préparation de la scène, etc. Nous avons chacun un rôle particulier, comme « Marty », qui s’occupe du design de la page web par exemple. András est un peu le « personnage principal ». C’est lui qui gère le tout dans sa globalité, étant donné qu’il est à l’origine du projet. Dans mon cas, je me charge de la communication.

JFB : Comment vous occupez-vous de la programmation ? Est-ce que chacun prévient les autres dès qu’il a un coup de cœur pour un artiste ? Êtes-vous restreints au niveau de l’univers musical que vous désirez valoriser ?

A.N. : Personne n’est prédominant. Nous repérons les artistes que nous voulons faire venir. Et nous nous réunissons pour choisir, mais nous sommes ouverts musicalement. La promotion de noms peu voire pas connus est notre ligne directrice. Nous faisons une grosse liste.

K.P. : À la base, nous sommes des amoureux de la musique. Oui, on peut le dire, nous sommes des amoureux de la musique.

JFB : Y’a-t-il une affluence importante au UH Festival ?

A.N. : Tout dépend de ce que vous entendez par affluence importante. Il y a environ 2 millions d’habitants à Budapest, alors vous savez… Bon, après, plusieurs centaines de personnes viennent aux concerts, donc interprétez-le comme vous le voulez.

JFB : Est-ce un chiffre qui a évolué dans le temps ? Avez-vous vocation à étendre votre public ?

K.P. : Au départ, il n’y avait pas énormément de personnes, et puis les gens qui sont sensibles à ce genre de musique ont commencé à s’intéresser et à venir au festival. Nous avons bâti notre propre public, en somme. Mais nous n’avons pas l’intention de doubler, ou de tripler l’affluence, ce n’est pas l’objectif. Notre musique n’est pas commerciale. Nous n’avons pas l’intention de changer notre ligne directrice pour satisfaire un auditoire qui écoute du « mainstream ». Nous ne sommes pas figés par des idées de marketing quelconque.

JFB : En quoi la musique moderne est-elle particulière ?

A.N. : La musique que nous mettons en avant est une musique qui nous inspire, pour laquelle nous n’avons pas forcément besoin de réfléchir, mais seulement de nous asseoir et d’écouter. Ce n’est pas de la musique « particulière » au sens propre, car pour moi la musique que nous entendons à la radio n’est pas de la musique. Elle a perdu son aspect de « musique » par le biais même de sa dimension commerciale.

K.P. : Ce qu’il est intéressant de voir aussi, c’est que les gens qui se rendent à un festival de musique commerciale y vont pour un nom, pour une tête d’affiche. Dans notre festival, l’audience est composée de personnes qui viennent pour écouter des artistes inconnus. Ils nous font confiance, désormais, malgré la méconnaissance des artistes, sachant qu’ils apprécieront de toute façon. Ils savent que nous partageons les mêmes goûts.

Clément Goutorbe

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