« Les quatre saisons - si elles existent toujours »

« Les quatre saisons - si elles existent toujours »

L’exposition à la galerie Virág Judit présentée par Anna Kelen

La célèbre galerie d’art Virág Judit a présenté une exposition des peintures d’Eszter Radák. A travers un style personnel étonnant, l’artiste conçoit depuis une vingtaine d’années une œuvre picturale contemporaine mettant en scène les thèmes de la nature et de l’intérieur. Vice-présidente des Beaux-Arts de Budapest, l’art d’Eszter Radák est réputé tant en Hongrie que dans d’autres pays du monde.

Si cette galerie, également maison de ventes aux enchères, a pour habitude de présenter des peintures hongroises classiques, l’exposition actuelle est une exception à la règle.

L’exposition à la galerie Virág Judit est axée principalement sur les saisons et les changements qu’elles amènent. Les premiers pas dans la salle de l’exposition se révèlent surprenants : un mélange de couleurs vives comme on en voit rarement donne aux paysages et aux scènes d’intérieur une atmosphère presque irréelle. De plus près, les tableaux présentent un assemblage de plusieurs courants de peinture – pointillisme, impressionnisme, symbolisme... – qui font l’unicité de l’œuvre. Tous sont accolés de titres étonnants et plein d’humour. Eszter Radák capte l’attention du visiteur et réussit à la garder.

Nous avons rencontré l’historienne d’art Anna Kelen, qui nous a guidés à travers les salles de la galerie.

JFB : Comment avez-vous décidé de présenter cette exposition, pourquoi ce choix ?

Anna : Nous travaillons avec Eszter Radák depuis dix ans environ. Nous aimons son art et sa personnalité, pleine d’humour et d’esprit, comme ses tableaux le montrent. Elle est vice-présidente des Beaux-Arts de Budapest et ayant un diplôme en histoire de l’art, la réflexion est au cœur de son œuvre. Et souvent, elle fait référence à d’autres artistes.

JFB : Oui, on voit qu’elle a différentes inspirations, par exemple ici on pourrait voir du Monet ?

Anna : Oui, totalement ! Mis à part Monet, on remarque que David Hockney est l’artiste qui a le plus d’influence sur son œuvre. Elle l’admet d’ailleurs dans sa thèse, parce qu’elle écrit beaucoup sur la théorie de l’art. Mais elle s’inspire également d’artistes hongrois. Par exemple elle se consacre aussi à la peinture du lac Balaton – ce paysage est tout un chapitre dans l’histoire de l’art hongrois. Et regardant ses toiles, on peut les associer facilement au peintre hongrois Egry József.

JFB : Quelles sont les thèmes principaux des œuvres exposées, à part les saisons de l’automne et du printemps qui apparaissent majoritairement ?

Anna : Sa première exposition dans notre galerie fut sur l’Intérieur, mais aujourd’hui son travail s’oriente vers le changement des saisons et le changement de lumière. Ces tableaux ici ont été inspirés par le lac Balaton et par les intérieurs de sa maison. Ses séjours en France marquent également une partie de son œuvre. Elle a en effet souvent traversé la France pour regagner l’Angleterre, le pays de son mari. Il y a aussi des tableaux plus intimes, représentant des endroits qui existent réellement. Ce n’est jamais des endroits imaginaires et ses tableaux parlent à tout le monde.

JFB : L’art de la création, comment cela se présente sur le plan technique ? Combien de temps met-elle pour réaliser une toile ?

Anna : Elle les finit assez rapidement, en quelques semaines. Sauf pour ce tableau, qu’elle a dû refaire de nombreuses fois. Comme il y a plein de chaises autour de la table, la table n’a pas de pieds. C’est donc une table flottante, elle est finalement comme suspendue.

JFB : C’est assez intéressant parce qu’on dirait qu’elle utilise des styles différents. Est-ce volontaire ? Comment décririez-vous son style ?

Anna : Elle joue avec la perspective d’une manière où vous ne pouvez jamais vraiment savoir si c’est de la deuxième ou de la troisième dimension, ou quelle est exactement la perspective, elle joue avec cela consciemment. En ce qui concerne les couleurs, elles sont très vives parce que l’artiste est allergique au produit chimique qui les atténue.

JFB : On dirait parfois que certaines peintures sont issues de photographies ou d’un film…

Anna : Oui, elle utilise la photographie. Elle prend toujours une photo si elle voit quelque chose d’intéressant dans la nature ou dans sa maison, et ensuite elle travaille dans son atelier pour la peindre.

JFB : Oui, c’est vrai que c’est très joyeux. Et en même temps c’est sa propre manière de dépeindre la nature, par exemple cet arbre n’est pas juste marron, il y a d’autres couleurs…

Anna : Oui et c’est toujours comme ça. Il y a cette œuvre avec le paysage enneigé. L’artiste m’a dit que, bien que ça soit enneigé, elle n’a pas utilisé de blanc. C’est bleu, c’est rose et très joli.

JFB : Ici, à la Galerie Virág Judit, vous faites des expositions mais vous êtes également une maison de vente aux enchères. Comment cela fonctionne-t-il ?

Anna : C’est notre activité principale. Nous organisons trois ventes aux enchères par an, en ce moment nous collectons du matériel pour notre vente de printemps. Au quotidien nous organisons des expositions à but non lucratif. A chaque novembre, nous organisons une exposition représentative, où notre but n’est pas la vente.

JFB : Avez-vous beaucoup d’acheteurs pour cette exposition ?

Anna : Effectivement, aujourd’hui nous avons vendu tous les tableaux – sauf le plus grand - ce qui est très bien si l’on considère les standards hongrois. De plus, Eszter Radák est une artiste contemporaine et normalement nous n’avons pas vraiment le marché pour cet art, car nous travaillons sur des artistes classiques du XXe siècle. Eszter Radák est la première artiste contemporaine avec qui nous travaillons. Mais elle a beaucoup de succès et nous aimons beaucoup travailler avec elle.

JFB : Est-ce que votre galerie est la première maison de vente aux enchères de Budapest ?

Anna : C’est l’une des premières maisons de vente aux enchères, car ma mère, Judit Virág, est la propriétaire depuis… toujours ! Vous savez, c’est la rue des galeries. Il y a beaucoup de maisons de vente aux enchères en Hongrie.

JFB : Organisez-vous des rencontres entre l’artiste et son public ? Aime-t-elle interagir avec lui ?

Anna : Oui, elle est venue à la galerie, c’est très facile de communiquer avec elle. Lors des visites guidées, lorsqu’Eszter est venue, la salle était remplie. Elle est très populaire.

Propos recueillis par Margot Ledun

Adresse : 1055 , Budapest, Falk Miksa u. 30 -  à voir en ce moment la collection de la vente de printemps  - jusqu’au 14 mai.   

 

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