Domino dominant

Domino dominant

Depuis 1877, l’année où Tivadar Puskás inventa le premier central téléphonique, le secteur des télécommunications a connu, en Hongrie, des hauts et des bas. Depuis quelques années, ce secteur est l’un des plus dynamiques de l’économie hongroise et fait l’objet de nombreux investissements étrangers. Même si le gouvernement hongrois a tout fait pour favoriser une situation concurrentielle, le marché est toujours largement dominé par l’opérateur historique, Magyar Telekom et ses filiales, un groupe solidement contrôlé par Deutsche Telekom. Les ménages hongrois consacrent en moyenne 4 pourcent de leurs revenus aux services liés aux télécommunications.

 

 Dans les années quatre-vingt le téléphone était un luxe. La ligne était tellement difficile à faire installer qu’on attendait le technicien comme on attend le printemps, sans certitude qu’il arrive à la date prévue. Cette rareté a eu pour conséquence une nette désaffection du téléphone fixe au profit du mobile. 3,4 millions de lignes fixes sont en service, ce taux de pénétration très faible (34 pourcent) (par fidélité envers nos institutions, j’ai choisi les chiffres de la mission économique car selon le site Operator Source le nombre de lignes fixes serait de 2,5 millions et le taux de pénétration réduit d’autant. S’agit-il d’une différence basée sur le nombre de lignes IP ? J’ai rencontré le même problème, sur un autre sujet, en comparant des chiffres de la Bundesbank et de KSH, l’institut statistique hongrois... Comment construire l’Europe si l’on ne peut pas se mettre d’accord sur les méthodes de calcul de nos statistiques ?) est plus de trois fois inférieur à celui du téléphone mobile. Même avec le système des offres groupées (télévision, téléphone, Internet) les lignes fixes ne semblent devoir leur survie qu’aux entreprises (une entreprise sans ligne fixe cela ne fait pas très sérieux, encore aujourd’hui). Comme toujours, l’opérateur historique a pu conserver une très large majorité de ses abonnés. Ce phénomène qui fait la joie de nombreuses sociétés comme TF1 ou EDF se retrouve en Hongrie. Changer, c’est compliqué. Changer, c’est plonger dans l’incertitude. Pourquoi changer ? Moralité, Magyar Telekom a 77 pourcent de parts de marché dans la téléphonie fixe (79 pourcent pour Operator Source).

Le secteur de la téléphonie mobile a connu un développement rapide tant sur le plan du nombre d’utilisateurs que sur celui des technologies utilisées. Trois entreprises se partagent le gâteau. T-Mobile (45pourcent), Pannon GSM (35pourcent) et Vodaphone (20pourcent). Au deuxième semestre 2007, Pannon a attiré, paraît-il, 55 pourcent des nouveaux souscripteurs mais on ne peut guère en tirer de conclusions sur l’évolution du marché (d’autant moins que le chiffre provient d’un analyste américain qui pensait que Pannon dominait le marché...). Néanmoins, lors d’une conférence sur le bilan de l’année 2007, les dirigeants de Magyar Telekom ont admis une baisse de 5 pourcent des revenus dans le secteur de la téléphonie mobile, mais compte tenu des nombreux investissements en Slovénie comme au Monténégro, l’avenir semble annon-ciateur de lendemains qui chantent ! Le taux de pénétration pour le téléphone mobile, en Hongrie, serait de 100, 9 pourcent pour certains et de 109,7 pourcent pour d’autres (10pourcent de différence, et il ne s’agit que d’un article sur les télécommunications, imaginez les différences s’il s’agissait de traiter des chiffres du chômage en période préélectorale ! Ce n’est pas un métier je vous jure !). Face à ce chiffre, les opinions varient sur le fait de savoir si le marché est saturé compte tenu qu’un taux de pénétration de 175 pourcent peut être constaté dans d’autres pays de la région.

En matière de services proposés, tous les opérateurs possèdent une licence 3G et sont avides de développer une gamme de services appropriée. Les coûts d’acquisition des licences ayant été prohibitifs, la rentabilisation n’est pas pour demain. L’utilisation du portable, particulièrement des SMS et MMS, est un must pour les jeunes Hongrois. Il est ainsi possible aux élèves de continuer leurs conversations de la sortie du lycée à leur arrivée au domicile parental. Mais ces jeunes consommateurs sont exigeants sur la qualité des services particulièrement en ce qui concerne les temps de téléchargement de musique ou de jeux. Les menus de ces services semblent conçus pour vous faire perdre le plus de temps possible. Il est à noter que le jeune consommateur n’hésite pas à calculer l’efficacité des services de son opérateur pour ensuite afficher les résultats sur son blog. Quand on pense au sentiment de fierté qu’avait ressenti son grand-père à l’arrivée du téléphone fixe dans le logis familial on ne peut s’empêcher de penser que la vie est devenue dure pour les commerciaux !

En ce qui concerne Internet, la concurrence fait rage comme dans les autres secteurs et les chiffres diffèrent tellement que ceux que je vous propose sont une moyenne des moyennes. Le nombre d’utilisateurs varie avec la définition de l’utilisateur, on peut estimer (à la louche) qu’ils seraient 3,5 millions pour 1,5 millions d’abonnements dont 15 à 20 pourcent sans fil. Selon la fiche de synthèse précitée de la mission économique, plus de 500 hotspots (à Budapest) viendraient compléter cette offre, 73 pourcent des connections seraient à haut débit et il y aurait 323 opérateurs (du moins au premier trimestre 2007). Selon certaines sources proches des milieux intéressés mais dont la fiabilité n’a pu être établie, Magyar Telekom aurait entre 41 et 45 pourcent de parts de marché sur le segment des connexions Internet. Une chose est sûre, cette société investit frénétiquement dans l’Internet mobile et met en avant la qualité de ses services dans ce domaine avec force publicité.

Pour finir, notons que comme de coutume dans ce pays les services aux entreprises sont plus performants que les services aux particuliers. De plus, le personnel commercial des opérateurs n’est pas spécialement aimable et il ne fait pas bon être pressé lorsque vous vous rendez chez l’un d’eux. Pour installer Internet, UPC vous demande d’être disponible toute la journée, ce qui n’est pas sans rappeler les beaux jours des techniciens de chez MATÁV. Bref, des progrès sont possibles.

 

P.S à méditer : Selon Alfred Sauvy : «Dans toute statistique, l’inexactitude du nombre est compensée par la précision des décimales.»

 

Xavier Glangeaud

 

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