Ça fait mal

Ça fait mal

Agota Kristof vit en Suisse, écrit en français et, depuis des années, est devenu un auteur connu de la littérature francophone. L’une de ses oeuvres les plus célèbres est Le grand cahier, traduit à ce jour en 35 langues. Agota Kristof est arrivée avec son mari à Neuchâtel en 1956 comme réfugiée et y est restée. Au début elle ne parlait pas du tout français mais, c’est lors des pauses, dans l’usine d’horloges où elle travaillait, qu’elle a commencé à l’apprendre. 12 ans après son arrivée, elle a commencé à écrire en français et une maison d’édition parisienne a publié ses oeuvres qui ont rapidement connu le succès. Elle a écrit de nombreuses pièces de théâtres qui sont jouées jusqu’au Japon. C’est justement l’une de ses pièces que l’on pourra découvrir le 29 janvier à 19:00 au Palais des Arts (MUPA).

Le style d’Agota Kristof est très singulier, qu’il s’agisse de ses romans ou de ses pièces ; elle y maîtrise admirablement le suspens, tenant les spectateurs en haleine. Si son écriture et son style sont simples et faciles à appréhender, elle fait beaucoup travailler l’imagination de ses lecteurs. Parfois on ne sait pas où l’on est, quand et qui parle. Il n’est pas non plus toujours indiqué en présence de qui l’histoire a lieu, ni où elle a lieu. La pièce Ça fait mal représente bien les absurdités de la Seconde Guerre mondiale, les changements incessants du tracé des frontières, la précarité de l’existence, la relativité de la paix et le bouleversement de l’enfance. La pièce accompagne la vie de Claus et Lucas, des jumeaux, de l’enfance à la vieillesse. Ou plutot d’un homme appelé Claus ou Lucas. On ne peut pas savoir si Claus et Lucas sont vraiment des jumeaux ou s’il s’agit du dialogue intérieur d’une personnalité schizophrène avec elle-même. On ne peut pas savoir si la mère protège ou assassine quelqu’un, si le secrétaire homosexuel du Parti est un ami ou un ennemi, un résistant ou un oppresseur. Tout les personnages ont plusieurs chances et une répartition multiple des rôles. Mais l’on voit toujours la même scène finalement, et la fin de l’histoire est toujours la même mais présentée selon différents points de vue. Dès que l’on accepte que l’histoire parle de jumeaux, Agota Kristof nous incite à envisager que l’on a sous les yeux le jeu d’un esprit schizophrène. L’adaptation du Grand cahier nous raconte l’histoire par de nombreuses images-mosaïques et scènes brèves, parfois en paroles, parfois muettes, ou encore avec musique ou chant. Une expérience à ne pas manquer ! (NB: Spectacle en hongrois avec ou sans dialogues, mis en musique ou en silence...)

Beáta Szathmáry

 

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